Saint-Augustin-de-Woburn, Québec
Le massif du mont Gosford fait partie de la chaîne des Appalaches et s'étend de part et d'autre de la frontière qui sépare le Québec du Maine. La ville de Sherbrooke se situe à environ 70 km vers l'ouest. Le massif, qui atteint 1189 m à son point culminant, est dominé par la forêt qui change de composition selon l'altitude. On retrouve ainsi principalement de denses forêts de sapins baumiers et d'épinettes rabougries au sommet alors que les sapins baumiers et les bouleaux à papier occupent l'espace plus bas. Le massif compte également quelques sections pourvues de repousses secondaires qui sont apparues à la suite d'une coupe.
La Grive de Bicknell est une espèce endémique du nord-est du continent et possède l'une des aires de répartition les plus restreintes parmi toutes les espèces qui nichent en Amérique du Nord. Le massif du mont Gosford est l'un des rares endroits au Canada où l'on retrouve un nombre important de cette espèce vulnérable au niveau national.
Des recherches effectuées sur le massif (de même que sur le mont Mégantic) au cours des étés de 1997 et de 1998 ont permis de déterminer quels types d'habitat préférait la grive. Sur le massif, on a découvert que les grives nichaient à une altitude de plus de 775 m, dans un environnement humide et frais pourvu principalement de sapins baumiers. On a aussi constaté que les grives appréciaient les endroits densément boisés, peu couverts d'herbacées mais surtout de mousse et où l'on retrouvait des chicots et des arbres morts. Enfin, il a aussi été noté que les grives fréquentaient les forêts de bouleaux à papier et d'épinettes, mais dans des proportions moins importantes.
Des données obtenues par satellites ont permis de déterminer que près de 2000 ha du mont Gosford constituaient un habitat idéal pour la Grive de Bicknell. À partir de cette information, les chercheurs ont pu établir des itinéraires et des points de recensement en vue de connaître le nombre de mâles chanteurs qui étaient présents dans certains secteurs. En utilisant la superficie de l'habitat disponible et les données concernant la grandeur moyenne du territoire occupé par un mâle, il a été évalué que 1749 à 3449 mâles fréquentaient le site du mont Gosford. Si on ajoute un nombre équivalent de femelles au total, le nombre d'oiseaux serait alors significatif au niveau mondial. Plusieurs sources d'erreur pourraient toutefois avoir contribué à rendre cette estimation trop élevée.
Au Québec, il a déjà été estimé que la population de Grives de Bicknell variait entre 3000 et 5000 individus; la nouvelle étude semble cependant indiquer que la population avait été sous-évaluée. Le même cas s'appliquerait probablement à la population mondiale qui a été évaluée entre 5000 et 15 000 individus.
La portion canadienne du massif du mont Gosford a été nommée Zone d'exploitation contrôlée (ZEC) Louise-Gosford, une désignation qui indique principalement que la faune y est préservée pour les chasseurs. Bien que le secteur fasse l'objet de coupes forestières, l'altération de l'habitat de nidification de la Grive de Bicknell demeure la plus importante menace pour cette espèce. La grive niche en effet à l'intérieur de forêts denses où les arbres sont âgés de 15 à 40 ans et ont poussé à la suite d'une coupe; il s'agit donc d'un habitat éphémère étant donné que les arbres atteindront éventuellement leur maturité. Les éclaircies précommerciales (qui ont été effectuées récemment et qui sont prévues pour les prochaines années) s'avèrent également négatives puisqu'elles réduisent l'étendue de l'habitat favorisé par les grives. Une plus faible densité d'arbres équivaut également à un accroissement de la prédation des nids par l'écureuil roux, le tamia rayé, la Corneille d'Amérique, le Grand Corbeau, le Geai bleu et le Mésangeai du Canada. Nous ne possédons aucune donnée sur la situation de la grive avant que l'exploitation forestière du massif ne soit entreprise.
Enfin, il est à noter que les irruptions de tordeuses des bourgeons de l'épinette ont aussi collaboré à modifier l'environnement de la grive dans ce secteur ainsi que les secteurs avoisinants, et, si l'on tient compte du cycle de l'insecte qui a été établi, il est plus que probable qu'une autre invasion ne survienne d'ici quelques années. Les autres menaces incluent les retombées atmosphériques d'acides et de métaux lourds toxiques ainsi que le réchauffement de la planète, deux éléments qui auraient comme conséquence de déprécier la qualité de l'habitat de la grive en ralentissant la croissance des arbres ou en permettant à d'autres espèces d'arbres de s'établir.
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